dimanche, janvier 21, 2007

Les deux sales rats des champs (Partie 9)

Pris au piège dans les griffes de nos pires ennemis, nous nous retrouvions en quelque sorte, malgré nous, dans le jeu du chat et de la souris. Cependant, à ce moment-là, nous étions "la souris" et eux, "le chat" et, ce jeu ne nous était donc pas piqué des hannetons!

Une véritable menace nous pendait sous le menton. Je sentais Lancelot un tantinet nerveux. Les deux mains serrées sur le volant, le dos arqué et les épaules enfoncées dans le cou, il fixait droit devant comme un cow-boy de l`Ouest qui est sur le point de dégainer... La tension était donc à son comble.

Pendant qu`une étrange odeur d`escarmouche planait dans l`air du petit habitacle pour nous vriller grossièrement les narines, mon pote allumait soudainement ses phares de routes. Envahi par une soif de rage, il narguait les deux sales rats pour espérer les déloger de leur trou. Le pied nerveux, il attendait soufflant comme un taureau contrairié pendant que, moi, tremblant comme une feuille au vent, je m`empressais de vérifier si ma ceinture de sécurité était bien verrouillée...

Même si des courants d`air passaient sous mon nez pour me rappeler que l`hiver me taquinait, le sourire en coin, jamais de ma vie je n`eus aussi chaud! Je transpirais de partout comme pas deux. Mais, était-ce de froid ou comme un soir de crise de verglas, je n`osais me poser la question. Au diable vert la raison, pensais-je! Tout ce qui me préoccupais à cet instant, était l`issue de cette confrontation.

Au bout de quelques minutes qui me parurent aussi longues qu`une journée entière à poiroter dans une salle d`attente de l`urgence d`un hôpital, le vieux Pick-up cabossé fonçait à vive allure vers nous. Avec des bancs de neige de plus d`un mètre de haut sur chaque coté du petit chemin, nous devions inévitablement, soit faire face et combattre ou fuir de reculons comme des poltrons.

Or, Lancelot avait déjà fait son choix. Le connaissant comme un grand guerrier, je savais qu`il n`aurait jamais pensé à déserter la queue entre les pattes! Immédiatement , il écrasait son pied sur la pédale de l`accélérateur. Mais, à notre grand désarroi, comme pour nous garantir d`un péril auquel nous n`avions pensé jusqu`alors, le moteur et les phares de notre petite voiture nous abandonnaient à notre triste sort.

Plus rien ne voulait fonctionner. Abasourdi, mon pote me semblait perdu dans sa manivelle à vitesse. Le temps nous était dès lors compté pour prendre la poudre d`escampette. «Aouie! Embraye...», lui hurlais-je à tue tête. «J`y peux rien... Joualvert!», se dépêchait-il de me répondre d`une voix terrifiée. À ce moment-là, je compris que notre fin était proche...

Entre-temps, le vieux Pick-up s`approchait rapidement et dangereusement. Même si le petit chemin était enneigé, ce véhicule des ténèbres arrivait facilement à surmonter les bosses de glace et de neige comme un ski-doo. Leurs phares se faisaient de plus en plus éblouissants. Nous n`y voyions plus rien sinon un gros soleil aveuglant du midi. Alors, face à mon tragique destin, je me fermais dès lors très fort les yeux. Bien crispé dans mon siège, une main tenant une petite queue de lapin dans le fond de ma poche de manteau et l`autre serrant fermement le bras de mon meilleur ami, je ne souhaitais qu`une chose: Que l`impact ne soit pas plus traumatisant qu`un tour d`autos tamponeuses!

(à suivre...)

Le Chat botté,

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