mercredi, janvier 31, 2007

Les deux sales rats des champs (Partie 11)

Le lendemain matin, très tôt vers l`heure où les premiers rayons de soleil apparaissaient pour illuminer le ciel de couleur rose et lilas, Lancelot et moi, nous étions déjà sur la route de la guerre en direction de la terre à bois du vieux curé de la paroisse. Après une nuit blanche à discutailler et à analyser mille et un complots possibles devant un chaleureux feu de foyer et une bière à la main, nous en étions venus à nous entendre sur un plan de match dont chacune des procédures devait être suivie à la lettre pour déloger au plus sacrant les deux sales rats des champs de notre campagne.

Rien ne nous fut pourtant rassurant malgré ce magnifique début de matinée. La température se maintenait toujours sous les trente degrés Celsius et un petit vent cinglant des Pays-d`en-Haut nous soufflait au visage des raffales de flocons pour aussitôt nous geler le bout du nez. Sur les chemins glacés, nous roulions lentement de peur de s`enliser dans de la neige gourmande et malicieuse.

Pendant que mon pote conduisait prudemment son petit véhicule, le dos arqué vers l`avant, je regardais avec émerveillement la nature se réveiller doucement. Sur les branches tordues d`un vieux chêne, deux écureuils taquins se couraillaient gaiement à la queue leu leu comme deux gamins excités dans une cour d`école. Plus loin, près d`un petit pont de bois, un chevreuil s`abreuvait de l`eau claire et scintillante d`un ruisseau à cascades. Après quelques instants de pur bonheur, j`en oubliais presque la raison de notre mission.

Enfin arrivés devant l`endroit où squattaient nos deux salopards sans scrupules, Lancelot immobilisait sa petite voiture sur le bord du chemin. Au loin, derrière une sapinière, nous pouvions aisément reconnaître le vieux Pick-up cabossé des années cinquante aux côtés d`une hideuse petite caravane. Sans plus tarder, nous marchions à pas de velours vers cet endroit. J`avais les yeux qui tournaient en rond et les oreilles bien tendues puisque, je me doutais que notre parcours pouvait être dangereusement semé d`écueils.

Tout nous semblait calme sinon quelques gros canards prisonniers qui, dans un petit enclos de fortune, tapageaient bruyamment. À cet instant, je chuchottais discrètement dans le creux de l`oreille de Lancelot la raison pour laquelle les Lamoureux furent, sans doute, dévalisés de quelques kilos de grains. Sans dire un mot, mon pote attira ensuite mon attention vers un amoncellement de bois de chauffage. Immédiatement, je me mettais en colère. Sur cet amoncellement, je reconnus la vieille roue de charrette que j`avais courageusement sablée et repeinte l`automne dernier pour l`exposer fièrement à l`entrée de mon chemin près de ma boîte aux lettres. Ces ciboères de tabernache avaient dû me la dérober la nuit dernière pendant mon absence...

À partir ce de ce moment-là, je ne pouvais plus me contenir. Le sang m`était monté à la tête et j`étais disposé à cracher du feu par tous mes orifices. Mais, tel un soldat en devoir, Lancelot me dévisageait silencieuse et avec insistance pour me faire comprendre que, de par mon comportement irréfléchi, notre complot pouvait facilement tomber à l`eau. Sur sa requête, j`avalais instantanément ma rage de travers. Sans lui à mes côtés pour me raisonner, je m`aurais, sans aucun doute, emballé comme un taureau endiablé pour foncer tête première vers la petite caravane la batte de base-ball à bout métallique en main.

(à suivre...)

Le Chat botté,

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