mercredi, août 02, 2006

À la découverte d`un champ biologique avec Lancelot, mon pote agronome (Partie 3)

Tel un soldat fier à l`esprit rude, Lancelot continuait toujours son inspection, malgré les vents forts et violents qui sévissaient à travers le champ. Tantôt immobile et paisible, tout le paysage s`animait dès lors dangereusement. Les tiges de maïs se balançaient d`un côté à l`autre, vigoureusement, et cela me donnait l`effroyable impression d`être perdu de tout bord tout côté.

Désemparé comme un gamin en pleur, je pensais tomber dans un gouffre inconnu. «Attend-moé!», lui criais-je à gorge déployée. Mais, sous un ciel plus noir que le fond de la gueule d`un loup et où, seuls les éclairs illuminaient le sol durant quelques fractions de seconde, dans le fracas des coups de tonnerre, toutes mes tentatives restaient veines! Trop préoccupé à terminer son travail pour lequel il avait été mandaté, mon pote s`en était allé, me laissant seul parmi des ombres qui me donnaient la chair de poule...

Tout d`un coup, pour rester immobile comme un épouvantail des champs, je sentis quelque chose, de froid et humide, se mouvoir lentement sur mon pied pour, par la suite, s`enrouler rapidement sur ma jambe. Même si je devais me protéger le visage de mes mains pour ne pas recevoir une volée de coups de tiges, semblable à celle d`un fouet déchirant la chair du corps, je tentais néanmoins d`y jeter un regard curieux.

Or, à cet instant même, un joug s`abattait sur le champ de monsieur Lamoureux. Je fus désormais prisonnier sous une pluie torrentielle mêlée de beaucoup de grêles. Immédiatement, je sortis de mon état cadavérique pour sautiller d`un pied sur l`autre et me projetais à plat ventre sur le sol. Je m`imaginais vivre mes derniers instants sous le regard amusé d`un démon serpent. C`est alors que j`invoquais le Seigneur: «qu`ai-je fait pour mériter un tel supplice?». Chacune des grêles qui tombait sur mon dos me donnait l`impression que l`on me lapidait de galets de la grosseur d`un oeuf de dinde! Même si j`étais recroquevillé comme un animal blessé et que je me protégeais la tête à l`aide de mes mains, je souffrais le martyre de Saint Étienne. Quand, soudain, au moment où j`allais déraidir mon corps pour l`abandonner à tout jamais aux bêtes féroces et aux oiseaux rapaces afin qu`il soit dévoré d`un trait, je sentis une chaleur m`envelopper tel un baume apaisant. Même si le vent soufflait toujours à rafales glacées et que les tiges de maïs tombaient, une à une, sous les grêlons comme des condamnés à mort fusillés par un peloton d`exécution, je n`éprouvais plus aucune douleur. Étais-je mort, pour être affranchi à jamais du mal de vivre? Je n`en avais aucune idée jusqu`au moment où, j`entendis Lancelot me chuchoter à l`oreille que la tempête allait bientôt s`éloigner. Complètement allongé sur mon dos, il me protégeait d`une nature déchaînée.

N`eut tôt dit que ses prédictions se concrétisaient. Le ciel s`éclaircissait pour laisser entrevoir un coucher de soleil à l`horizon d`un champ complètement dévasté et anéanti. Ces sentinelles affublées en aigrette regorgeant de ressources avaient rendu l`âme. Seul un plant téméraire, ici et là, se tenait encore à moitié debout pour saigner à blanc. Le spectacle était des plus horrifiants. Le sol était tout recouvert d`un amas de billes de glace. Je m`aurais cru le jour d`une première neige! Estomaqués, Lancelot et moi, nous gardions le silence. Soudainement, au loin, nous entendions des échos de cris déchirants. C`étaient monsieur Lamoureux et sa petite fille, Jacinthe, qui nous interpellaient. Sachant que nous étions reclus entre les griffes acérées d`une bête gigantesque à sept têtes défilant sur leur champ au gré d`un vent colérique, ils s`en inquiétèrent pour se faire du mauvais sang.


(à suivre...)

Le Chat botté,

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