mercredi, décembre 13, 2006

Ma vie sans dessus dessous (Partie 8)

La température était de plus en plus fraîche au point de devenir désagréable. Un vent nordique s`était levé pour souffler quelques flocons de la grosseur d`un dix sous. À l`endroit où nous nous trouvions, le sol n`était pas encore recouvert d`un épais manteau blanc. Mais, pour avoir récemment bravé ma première grande tempête de neige de la saison dans le Pays du Loup-Garou, je me doutais bien que je revivrais pareille circonstance d`un instant à l`autre. Cependant, j`espérais dans de meilleures conditions...

Rocky était toujours paralysé comme la statue d`une pierre tombale et moi, souffrant d`une douleur à une jambe et encore trempé de la tête aux pieds, je sentais que j`allais devenir sa soeur jumelle... Alors, avant de mourir complètement gelé, mon héros me marmonnait à travers ses dents serrées de fouiller dans la poche de son pantalon. «Mais que diable, à quoi penses-tu?», lui demandais-je l`air étonné. Rocky fit mine de rien comme si le seul fait de bouger ses lèvres lui valait toutes les souffrances du monde. À cet instant, je compris qu`il était sérieux et j`obtempéra sur-le-champ.

Avec une taille bien enrobée dans un jean trop serré, j`eus cependant de la difficulté à y insérer ma main. Mais, au bout de quelques tentatives infructueuses, je réussissais à vider tout le contenu de la petite poche. Un vrai bric-à-brac! Un couteau à cran d`arrêt, un vieux briquet à essence rechargeable, un petit crayon de bois rongé des deux bouts, des attaches, mais sans un sou... Rocky est le modèle type du fermier contemporain: fort, courageux et débrouillard comme pas un, mais pauvre comme un mendiant!

De la main gauche, il me faisait signe de prendre le briquet et de son autre main tremblante, il me pointait des broussailles. Même si je n`étais pas malin comme lui, je compris immédiatement ce à quoi il faisait allusion. Je rampais alors comme une chenille sur un sol froid et humide afin de ramasser quelques brindilles. Malheureux que le p`tit torrieux de castor ne soit pas dans les parages, car je lui aurais volontiers et avec joie subtilisé quelques fruits de ses efforts! Néanmoins, après m`être écorché la peau ici et là sur des cailloux à peine dissimulés sous une mousses de sphaigne encore verdoyante, je pus finalement construire un petit feu de camp sous forme pyramidale. Pour avoir visionné plusieurs vieux westerns, j`avais idée de la chose...

Tout était fin prêt pour enfin se réchauffer la couane. Je pris le vieux briquet dans ma main et de mon pouce, je frottais énergiquement la pierre par une roue métallique. Mais, à ce moment-là, je ne m`attendais pas à subir un autre calvaire. Il était pire que ceux vécus plus tôt durant la matinée... Une flamme immense de couleur jaune-orangé monta si haut qu`elle me brûlait aisément les sourcils. Par chance que je portais une casquette! Rocky se tordait de rire tout en se soutenant fermement le ventre de ses deux mains. «À l`avenir, rappelle-moé de régler la mèche de ton maudit briquet avant de m`en servir...», lui dis-je d`un ton sec.

(à suivre...)

Le Chat botté,

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