mercredi, décembre 27, 2006

Un Noël inoubliable (Partie 6)

J`avais la bouche grande ouverte et la langue pendante. Je me tourmentais tragiquement sur mon sort comme un forcené qui tente de monter sur un âne. Qu`allais-je faire sans eau courante? Nouvellement installé à la campagne, cette catastrophe naturelle m`avait pris au dépourvu!

Je me souvenais alors du mode de vie de mes ancêtres qui, sans cette précieuse énergie qu`est l`électriciré, survivaient malgré tout. Je frappais aussitôt énergiquement du pied sur les glaçons comme un cheval énervé pour, par la suite, les disposer dans une grande marmite que j`avais suspendue en crémaillière dans l`âtre du grand foyer.

Je fus fière de moi! Tout en dégustant tranquillement une tasse de café chaud non filtré à la Suédoise, à l`aide d`une grande fourchette de barbecue, je rôtissais de larges croûtes de pain brun préalablement badigeonnées de beurre fondu sur une braise incandescente. Un pot de confiture maison aux mûres sauvages, une pointe de Cheddar mi-fort, une banane et bien sûr, un p`tit remède de Grand-mère contre le rhume et je m`étais servi un p`tit déjeuner à la bonne franquette!

Regaillardi pour m`en frotter la bedaine, je décidais de nouveau me pointer le nez au grand air. J`avais envie d`explorer mon univers blanc comme un trappeur des bois. Avec un bonnet à rabats en poils de lapin sur la tête, un gros chandail en laine sur le dos tricoté par les doigts de fée de ma mère et des raquettes en babiche dans les pieds, je fus prêt à faire le grand saut! J`ouvris la vieille porte de bois massif et par malheur, je perdis mon souffle pour quelques secondes. Recevoir un sacré coup de pied au derrière qui nous propulse de l`avant comme un réacteur d`avion ne m`eut été plus saississant! Un épais banc de neige avait déjà enseveli le tiers du cadrage de la porte. Comme une houle déchaînée, de gros flocons voltigeaient de tout bord tout côté sur un vent terrible. La nature n`avait pas fini de chambouler ma vie...

J`étais à nouveau estomaqué! La panique ne tardait pas à m`envahir de la tête aux pieds. La neige s`accumulait rapidement aux fenêtres du rez-de-chaussée pour laisser difficilement pénétrer la lumière du jour. J`avais l`étrange impression que ma maison coulait à pique comme le bateau de mon cauchemar! Pour être loin de tout et de tout le monde, je pensais être le cadet des soucis pour les secouristes. Comment allais-je survivre à cette avalanche de malheurs?

Encore une fois, j`allais être à court de bois de chauffage. Alors, avant de mourir gelé comme un iceberg, je m`emparais d`une petite table basse en chêne sur laquelle je m`eus enfargé tant de fois et la jetais sans regret dans le feu ardent. Avec la chaleur qu`elle m`offrit aussitôt, je pus un instant me casser le ciboulot pour tenter de trouver une solution à mes malheurs afin de sauver ma peau et celle de mes fidèles amis qui, malgré leur fourrure, frissonnaient comme des grelots au cou des chevaux attelés au galot...

(à suivre...)

Le Chat botté,

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