dimanche, décembre 24, 2006

Un Noël inoubliable (Partie 4)

Après m`être assuré que le foyer ait dévoré tout ce que je lui avais offert, je fermais sa trappe gourmande et montais me coucher, une chandelle à la main, suivis de mon fidèle ami. Bien au chaud dans mon lit-bateau sous des couvertures en laine du pays, j`étais tout disposé à me reposer. Entre-temps, la pluie tombait toujours. Je pouvais l`entendre s`abattre avec rage sur la petite fenêtre à carreaux de ma chambre et sur la toiture en fer-blanc pour m`étonner de ses crépitements pesants et bruyants.

Même si je me sentais en sécurité dans le confort de ma petite maison, je n`en fus pas moins inquiet. Je me faisais du mouron pour mes amis que je souhaitais la venue le lendemain, le jour de Noël. Qu`allait me réserver cette nature campagnarde, parfois cruelle et impitoyable? Sans me douter ce qui m`attendait, des cauchemars allaient me fouailler l`esprit encore plus que la pluie glacée...

Je me souvenais que cette nuit me fut longue... dans l`attente d`une torture inhumaine! Somnolant, je rêvais que je voyageais sur un galion transportant des marchandises et quelques passagers. Parmi ceux-ci, se trouvaient des dames très élégantes. Vêtues de robe multicolore portée sur un jupon de deux armatures pour la faire bouffer sur les hanches, elles ressemblaient étrangement à de gros paniers. Moi, je fus un animal. Mais, pas n`importe lequel! J`étais le chat de la plus belle des créatures à bord. Ma maîtresse était très attentionnée. De ses petites mains, douces et soyeuses, elle me caressait sans cesse durant toute la journée.

Un jour, alors que nous naviguions dans une houle déchaînée et terrible sous une pluie colérique, nous fûmes attaqués, sans avertissement et avec beaucoup de violence, par des pirates. Des boulets de feu volaient de partout pendant que leur bateau se rapprochait de plus en plus du nôtre. Leur visage de la répression la plus brutale me terrifiait. «À l`abordage!», criaient-ils. Sans plus attendre, retentissaient à mes petites oreilles poilues et redressées des hurlements barbares à grand coups de sabre. Il y avait pourtant des hommes pour défendre notre navire, mais ils étaient trop peu et vulnérable devant cette légion de l`intolérance.

Le bateau enflammé ne tardait pas à couler. Étant donné que de nature, je craignais à la fois l`eau et le feu, je grimpais sur l`un des mâts de bois pour m`y cacher. Mais, au moment où j`atteignis avec effort la hune, par malchance, je dégringolais aussitôt dans le vide pour piquer la tête première dans l`eau.

Je me sentais aussi misérable qu`un poisson agonisant sur une banquise. Dans cette mer froide et houleuse, je basculais comme une vieille pendule qui ne peut plus s`arrêter. J`avais peu d`espoir de m`en tirer. Dans un ultime combat contre la mort, je criais le plus fort possible entre deux gorgées d`eau salée. Et, à l`instant où je commençais à piquer par la queue comme une pierre vers des profondeurs insondables, je sentis une main m`agripper violemment par la peau du cou pour me déposer, tout trempé, sur un grand coffre flottant à la dérive. C`était ma maîtresse. Dès lors rassuré, je m`agrippais à elle pour ne plus la quitter.

Sur ce rêve effroyable, je me réveillais tout en sueur et en sursaut. Assis dans mon lit en bataille, je cherchais à reprendre mon souffle et mes esprits. La nuit était tombée et à travers la petite fenêtre givrée, apparaissaient quelques doux rayons colorés. Après des heures d`incertitudes, tout me semblait à nouveau normal, sauf un détail. Tout à côté de moi, je sentais une présence inconnue. Sous les couvertures, Billy s`était agriffé au bas de mon pyjama comme un naufragé après une bouée de sauvetage.

(à suivre...)

Je souhaite à chacune et à chacun d`entre vous un joyeux Noël dans la paix et la joie.

Le Chat botté,

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